Lors du stage yoga et méditation du Samedi 14 Décembre, j’ai voulu aborder la question des émotions douloureuses et comment les traverser par la méditation, de façon à aller un peu plus loin que dans le protocole MBCT… Et j’ai pu constater que cela restait toujours un point difficile. Le yoga en revanche aidait mieux à la détente et la joie.
Je le constate également en consultation individuelle. Accepter sa vulnérabilité réellement, sans détours, sans chercher quelque chose pour se rassurer , en acceptant d’être envahi par l’angoisse, de ressentir un déchirement parfois dans la poitrine est chose très très délicate. Il faut du temps, beaucoup de temps et de patience pour » tourner » autour de cette faille et pas à pas parvenir à y entrer sans chercher un quelconque échappatoire. Accepter que rien ne va nous sauver. Que nous sommes seuls face à nous même et notre vécu.
Certains appellent cette douleur fondamentale l’angoisse existentielle, d’autres le vide…
Or c’est en traversant radicalement cette nature de notre être que nous pouvons paradoxalement commencer à exister. Mais selon notre histoire personnelle, toucher la souffrance peut provoquer un désarroi plus ou moins grand. Les traumatisés peuvent ressentir une détresse-panique insoutenable.
Pourtant, toutes les thérapies qui s’intéressent à la guérison des traumas vont proposer de retraverser les plus grandes douleurs, parfois en créant un » lieu sûr » afin de s’y reposer quand la détresse est trop forte parce que la douleur contient les souvenirs et la réponse qui peut nous soulager. ( EMDR, thérapie des schémas…)
Ainsi je me rends compte aujourd’hui qu’aborder la méditation et l’acceptation des émotions est loin d’être simple et que subtilement on va chercher à ne pas s’y confronter par des jeux de l’ego qui servent à compenser: réussite sociale, apparence etc… Qui peut vraiment mettre un genou à terre et rester dans cette fragilité lorsqu’il sait qu’il peut être moqué par son entourage?
Je suis parfois trop radicale et je n’aime pas vraiment les compromis. Pour moi, soit on apprend aux personnes en souffrance à s’accepter radicalement telles qu’elles sont ( afin qu’elles soient libérées de la souffrance justement, qui est liée à toutes les stratégies d’évitement de soi) soit on ne fait que du bidouillage.
Mais j’apprends avec l’expérience qu’il est bon d’y aller doucement et de ménager les résistances de chacun, là où il en est.
Et il m’apparaît un chemin plus juste pour apaiser, c’est la tendresse.
Par la tendresse, nous pouvons créer un climat de confort et permettre à la personne de laisser son être se déployer sans trop de craintes. En tenant la main lors de la traversée du trauma on ne laisse pas la personne tomber seule dans l’angoisse.
Ainsi je crois que proposer de la douceur et contribuer à l’autocompassion peut aider à accueillir peu à peu ses émotions , en parler sans honte et prendre confiance dans sa propre beauté dont on avait perdu le fil..
Ainsi je proposerai un prochain stage le 1er et 2 Mars 2014 non pas centré sur les émotions, mais sur le yoga et la méditation comme chemin de tendresse. Tendresse envers soi, envers son corps. Notre corps est notre temple. Je le coanimerai avec Odile Begue.
Et pour traverser les émotions difficiles, un travail individuel reste le meilleur chemin avec un thérapeute qui a traversé sa propre souffrance et s’accepte tel qu’il est, sans détour et surtout accepte la souffrance de son patient Sans en avoir peur ou chercher à la faire disparaître d’emblée ( à plus long terme bien sûr, l’objectif est qu’elle s’atténue !)
La compassion débute lorsque nous n’avons plus peur des émotions. Que nous aimons l’humain tel qu’il est , avec ses boiteries. Gros, moche, mal habillé, égoïste, has been, fragile, sensible, apeuré… C’est nous, c’est vous, c’est moi.
À bientôt!
Un texte du Docteur Yasmine Lienard
Merci, Yasmine, pour ce plaidoyer pour la tendresse, aussi/ surtout envers nous-même.
Serait-ce une façon (parmi d’autres) de nous faire sentir que nous sommes plus que « ces émotions douloureuses », plus que ces pensées et jugements souvent si durs?
Il me semble quand la souffrance risque de devenir insupportable pour nous, comme tu le dis… quand nous croyons que nous « sommes » cette souffrance, cette déchirement, ce jugement, et ne sommes que cela, qui surmonte de façon si intensive…
Et la tendresse envers nous-même, quel « lieu sûr » doux et bienfaisant…